Résumé épisode 3
Traversée nocturne aller Lla Franc-Pollensa, un peu comme si, débutant au ski, on vous emmenait sur la piste noire… (cf Majorquine 3)
MARDI 8 JUILLET, 8H
Le réveil est engourdi, mais nous comptons bien profiter d'un premier vrai jour de détente... La baie de Pollensa, largement ouverte au large, est un site de luxe, occupé essentiellement par des propriétés privées cossues et un gigantesque hôtel 4 toiles qui se réserve presque toute la plage... Nous décidons d'aller jusqu'à Port Pollensa, distant d'une demi-heure d'après Tabarly: même si, devenus méfiants, nous comptons le double, nous avons une chance de ne pas passer la journée en mer !
9H30
Nous nous glissons presque habilement dans un petit port encombré de cordages, entre deux raffiots oui n'ont pas dû prendre la mer depuis des siècles.… Le quai se révèle instable, comme si le mouvement des vagues s'était incrusté définitivement dans notre organe de l'équilibre... C'est l'heure des emplettes, et surtout, petite crevette, l'heure de prendre de tes nouvelles, excellentes rassure mamie...
Port Pollensa, village banal...
12H
Thierry et ses princesses repartent avant nous... Rendez-vous est pris sur une plagette de rêve, à 5 minutes...
12H15
Nous partons les rejoindre...
16H
… Nous les rejoignons… Car à 12H16 des rafales se lèvent brutalement au moment précis où en barreur imprécis j'embrouille en quittant notre place à quai le bateau dans les corps morts des voisins... Le vent par gifles nous plaque sur ces vieilles coques fragiles car vermoulues et dangereuses parce qu'hérissées de métaux rouillés... Corinne va se charger d'éviter les contacts au maximum, d'abord aidée par les enfants ravis, mais ceux-ci vont vite se lasser de la plaisanterie... Car pendant deux heures Denis et moi nous arcboutons de tous les cotés pour décoincer le stupide véhicule avec une remarquable absence de résultats... Mon capitaine visiblement inquiet saute comme une chevrette de coque à pont, de pont à quai, joue les funambules sur cables, saucissonne le bateau de cordes sur lesquelles je tire comme un sourd sans déplacer quoi que ce soit d'un centimètre... Le vent ne peut être seul responsable, nous finissons par comprendre que la quille doit être prisonnière... Confirmation est donnée au prix d'un délicieux plongeon de votre serviteur, bientôt imité par son petit camarade, dans de l'essence souillée de détritus et diluée légèrement d'eau de mer... Un spectateur français et compatissant compense un manque evident de présence physique par de nombreux et géniaux conseils, à titre d'exemple demander l'aide du gardien du port, qu'avec un peu de chance et beaucoup de ténacité nous pourrions distraire de sa sieste à condition d'attendre 17h et d'avoir une bourse à la mesure de notre maladresse... Un sursaut d'orgueuil, un raisonnement plus logique et la constatation du caractère maigrichon de la sus-dite bourse vont finalement avoir raison des tentacules qui nous enserrent et notre göelette reprend sagement sa place à quai...
Denis prend cette fois la barre, enclenche la marche arrière, entame un arc de cercle court, si court, troooop couuuurt ...même bêtise, même punition, notre quille espiègle s'engage avec précision dans le très identique enchevêtrement responsable de notre paralysante infortune... Une nouvelle heure d'efforts dans ce satané vent dont les bourrasques nous plaquent contre le quai finit par nous libérer, cette fois enfin définitivement...
16H, donc...
Epuisés, nous mouillons l'ancre près de Tamara, effectivement a cinq minutes du port... D'ailleurs pour un peu nous rations le coche, n'était Thierry qui nous guettait et nous intercepte...
16H04 ? 16H05 ?
Nous devons… lever l'ancre et remonter l'annexe devant les injonctions polies mais fermes d'un maillot de bain militaire qui, s'il avait laissé sans broncher un voilier au mouillage, ne pouvait maintenant collectionner les familles de civils sur une plage tout à fait réservée à l'armée comme l'indiquait le panneau en bout de grève…
17H
Retour en baie de Pollensa, où skis nautiques et voiles multicolores soulignent la pureté de l'après-midi qui vient de s'écouler. Détendus, reposés, bronzés, les heureux passagers du Tamara écoutent avec une feinte commisération nos récits de Tartarins... Bernadette en couve même d'un regard amoureux son "vrai homme" qui sait la mettre à l'abri de pareilles mésaventures, et Cathy s'étonne sans doute d'avoir quitté sa douillette banlieue parisienne pour cotoyer de tels marins d'eau douce...
21H
Nous sommes des vacanciers optimistes, la baignade dans l'eau tendre et claire de la baie nous a débarrassés de toute rancune, et le somptueux coucher de soleil nous réconcilie avec les Baléares, d'autant que demain s'annonce comme la journée immobile dont tout le monde a besoin...
MERCREDI 9 JUILLET
Jeux de mer et de plage, dans l'eau, petit dauphin, de ta carte postale... Yan trouve un fusil harpon, imagine sa joie, pour consoler Denis ... d'avoir perdu sa flèche dès son premier tir... Le soleil caresse enfin et ne brûle plus, le vent accepte de ne pas entrer dans la baie mais coiffe toujours de blanc les vagues au large, au cas sans doute où nous serions tentés de l'oublier... Thierry devient Tarzan définitivement pour les enfants en ramenant au bout de son harpon quelques muges...
Longue prornenade à terre, où le choix est clair entre les rocailles arides et publiques et les splendides gazons archiprivés... Aucune chance d'inaugurer la super tente igloo achetée dans l'espoir de passer quelques nuits sur la côte... Nous sommes ahuris de la densité de touristes, insoupçonnable depuis le bateau... J'apprécie particulièrement de pouvoir ainsi m'approprier des endroits qui seraient vite insupportables s'il fallait s'y rendre en auto et en file indienne...
Le soir nous réunit tous pour satisfaire au rituel qui s'impose désormais quotidiennement: LA METEO. Celle du jour comme celle du lendemain est riche en vents de toutes provenances, d'activité préférentielle dans la région.. des Baléares, bien sûr...
JEUDI 10 JUILLET
C'est pour rire en fait que nous écoutons la meteo, puisqu'en aucun cas elle ne modifie nos projets, du moins ceux de Tarzan... A 9h donc nous levons l'ancre direction le cap Formentor et la côte Nord de l'île… que nous longerons sans doute dans le plus grand confort puisqu'elle n'a pratiquement pas de crique abritée des vents... Si tu rencontres une crique, petit poisson-lune, pose lui la question: es-tu abritée des vents? Si la réponse est non, éloigne-toi, ce n'est pas une crique mais un piège...
12H
Nous faisons halte dans un piège, qui pour quelques heures, accepte d'être une crique, aux eaux profondes et pures, lestée d'un gros rocher aux parois verticales renvoyant l'écho des cris des mouettes. Repas sur le bateau, comme chaque fois c'est un petit tour de force de faire manger 5 personnes sur 2 mètres carrés... Le vent n'est pas trop méchant... Nous repartons vers une autre anse, Cala SanVicente, où nous passons l'après midi...
2OH
Puerto Soler ne serait qu'à 4 heures de navigation, d'après notre mauvais genie, oui, bien sûr navigation une nouvelle fois nocturne, mais cela vaut la peine selon lui de rejoindre l'unique abri réel de toute la côte d'autant que comme d'habitude ce soir les prévisions météo sont pour le moins mitigées... Denis et moi reprenons donc courageusement la barre, Corinne sa couchette et les enfants leurs jouets... La mer est plutôt calme, pour les navigateurs comme pour les pêcheurs puisque les lignes de traîne seront hélas parfaitement "silencieuses"... Au bout d'une heure à peine le feu de Thierry a repris loin devant sa sarabande: il doit sentir qu'il vaut mieux s'éloigner d'une possible source d'ennuis...
De fait, notre moteur toujours en marche pour appuyer notre voile timide, se met à cracher par accès une fumée très épaisse toute blanche, et le clignotant rouge du voyant d'huile fait du morse durant une bonne minute, aucun risque pour nous de sombrer (oh!) dans la torpeur décontractée du vrai plaisancier... Ce n'est qu'une alerte, qui rend toutefois nettement moins romantiques les falaises majestueuses dans le clair de lune...
O1H30
Nous entrons comme des grands dans Puerto Soler, sans être parfaitement sûrs de ne pas confondre lumières de la côte et lumières des bateaux mais enfin sans encombres...
VENDREDI 11 JUILLET
Corinne, Yan, Benjamin et moi débarquons sur la terre ferme pour quelques emplettes dans l'unique rue centrale du village, laquelle longe une plage mesquine qui hésite entre le sable et les galets... Les "Tamara" vivent leur vie... Denis reste au bateau, pressé de vidanger et vérifier le moteur et nous prépare, s'il vous plait, un poulet à la Catalane: Denis capitaine gâteau…
Après midi: plage et farniente pour tout le monde. Le soir, grande fête, c'est à dire apéritif pour les grands, glaces pour les petits, en vrais touristes dans un vrai café. Retour a bord à la tombée de la nuit; je tente de prendre "à l'espagnole"(boule de pain farcie d'hameçons) les nombreux mulets qui batifolent autour du bateau... C'est bien entendu pendant le repas qu'une touche violente emporte 1'appât et casse aussitôt la ligne que j'avais cessé de surveiller...
Et nous nous endormons, tous persuadés que le séjour sera désormais bonheur, nonchalance et carte postale... (Tu parles, Charles ! …)
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