Quelques mots aujourd'hui sur trois livres que j'ai particulièrement aimés, qui se détachent du lot de mes lectures cet hiver:
• Vous connaissez peut être ? de Joann SFAR
C’est l’histoire présentée comme vraie d’une manipulation dont a été victime l’auteur (surtout célèbre pour ses BD en particulier Le chat du rabbin, aussi pour son film sur Gainsbourg) du fait de Lili, belle femme « rencontrée » sur facebook et qui va rester virtuelle presque jusqu’à la fin et montrer toute la force délirante que peut prendre l’imaginaire chez un solitaire fragilisé par des déceptions sentimentales récentes. Il a beau flairer une histoire à dormir debout au gré des identités intrigantes affichées par Lili, il se laisse emporter par les sautes d’ humeur et l’hystérie « amoureuse » de sa correspondante. Cette aventure virtuelle tumultueuse dont il est le jouet mais qu’il alimente lui même avec complaisance lui permet étonnament nombre de réflexions non dénuées d’originalité sur… les juifs et les palestiniens.
En contrepoint (un peu comme la coccinelle des planches de Gotlib) les tribulations du même avec son seul compagnon réel du moment, son chien Marvin obsédé par un objectif unique: tuer des chats…
Une écriture alerte à l’humour pimenté d’autodérision, un livre de touche-à-tout surdoué.
• Courir au clair de lune avec un chien volé Nouvelles de Callan WINK
Si le titre de la première nouvelle, repris pour le recueil, n’avait pas suffi à piquer ma curiosité, les louanges distribuées par Jim Harrison et Thomas McGuane m’obligeaient à ne pas le rater. Cerise sur le gâteau, Callan Wink est aussi guide de pêche…
Et effectivement les textes sont très prenants, avec une écriture simple, vectrice fluide d’émotions vraies comme j’ai toujours aimé chez mes auteurs américains favoris (les critiques cités ci-dessus mais aussi des maitres comme Carver, McCarthy, Fante ou même Bukowski)
On y retrouve la nature, les grands espaces chers à J H, dans lesquels errent des personnages « du peuple », souvent perdus, comme désorientés, aux aspirations simples qui se heurtent pourtant aux rudes obstacles de contraignantes réalités.
• Le poids des secrets de Aki SHIMAZAKI
Cette auteure canadienne d’origine japonaise raconte la même histoire dans 5 petits romans d’environ 130 pages, ou plutôt les vécus différents des éléments d’une même famille qui dans son histoire a connu les bombes atomiques, le grand séisme de 1923, les conflits avec la Chine et la Corée.
C’est une merveille de délicatesse, de douceur, de poésie, de simplicité de style, tout en allant très loin dans l’expression des sentiments, des motivations, des conflits intérieurs de personnages.
C’est aussi un aperçu assez net de la société japonaise et de ce mélange de contraintes traditionnelles, de respect, de politesse, de douceur, mais aussi de duplicité, et de crimes, qui surprend parfois les occidentaux sous un masque feutré. On apprend sur l’histoire du Japon, sur le poids de la famille, qui comme partout ailleurs cachent certains cadavres dans le placard, même quand celui-ci est parfumé par les camélias (Tsubaki) ou les myosotis (Wasurenagusa).