Que les morilles n'aient pas un "ego surdimensionné"(une belle expression récemment acquise, lol) et ne montrent aucune tendance à l'exhibitionnisme, tout chercheur de champignons le sait, qui doit aiguiser ses yeux plus que ses mollets pour les découvrir dans des zones broussailleuses où leur tendance au camouflage se manifeste volontiers sous les fatras de feuilles et les buissons.
Un peu plus ennuyeux est quand les poussées elles-mêmes sont timides, comme cette année, alors que vous avez réussi à réserver un gîte communal en essayant d'avoir le bon timing. Cinq jours entiers pour explorer, élargir vos zones de recherche, au lieu de vous précipiter en quelques heures sur les places que vous connaissez depuis longtemps en espérant que d'autres ne les aient pas ratissées avant vous. Mais quand ces dames sortent au compte gouttes, même sur vos meilleurs coins, vous ne savez pas en explorant plus loin si la zone n'est pas favorable ou bien si ce n'est tout simplement pas une bonne année.
Car ne vous y trompez pas, on peut vous donner le nom d'un village ou même d'un bois, et même si la période semble idéale, ce ne sera jamais l'assurance que vous allez faire cueillette. A moins d'être un vrai spécialiste des sols et des arbres, difficile d'expliquer pourquoi les poupées pointent leur nez sur ces 50 m2 là et non sur le reste d'un hectare de forêt apparemment semblable en tous points au berceau qu'elles ont choisi.
Mais pas de découragement, ce caractère réservé mais facétieux des morilles peut à l'inverse réserver des surprises de dernière minute. Ainsi mon dernier jour m'a-t-il gratifié d'un cadeau inattendu. Après avoir sillonné en tous sens une pente boisée en pure perte, je repère une morille isolée comme l'ont toujours été cette année celles que j'ai dénichées. Mais cette fois cette sentinelle dressée (un peu comme font les marmottes…) veillait sur sa troupe d'une dizaine de copines d'un bon calibre disséminées sous les feuilles et branches d'aubépine à l'ombre squelettique d'un arbre mort sur pied.
Ironie comme souvent, ce "clap"inespéré siégeait dans une zone que je ne pensais même plus à sonder tellement elle était proche du village. Alors que j'avais pris la peine de faire quelques clichés d'exemplaires si rares que je prenais de temps en temps quelques minutes pour sortir l'appareil, mon couteau a grillé la politesse à l'objectif, trop heureux de recueillir ce petit trésor.
Le clap a moins d'allure sur une assiette, mais la photo c'est le prix à payer pour pouvoir frimer un peu, quoi, enfin au moins redimensionner timidement un ego qui faisait profil bas…
PS: (pour petit Raphaël, que les copains du blog connaissent)
On rencontre aussi des animaux préhistoriques étranges dans la nature, c'est pourquoi j'espère que dès l'an prochain tu voudras venir avec moi. Le spécialiste que tu es saura-t-il reconnaitre celui-ci ?